LA NOUVELLE REPUBLIQUE 10.10.2019
Chaque après-midi, des locataires se retrouvent dans le hall de leur immeuble pour occuper le terrain.© Photo NR
Des locataires partent en guerre contre les dealers© Photo NR
Une dizaine de locataires d’une tour, rue de Nimègue, se relaient chaque jour pour faire obstacle au trafic des dealers. En attendant un plus large soutien.
Ils sont trois cet après-midi-là, campés sur les marches du 9 rue de Nimègue à Poitiers. L’un est emmitouflé dans un sweat à capuche, le téléphone vissé à l’oreille, l’autre, un chien à ses pieds, scrute les alentours tandis que le troisième dirige son regard vers le hall d’entrée. Il y a là Françoise, Catherine, Virginie, Véronique, Christelle, Xavier. Au total, une petite dizaine de locataires de tous âges et de toutes origines qui depuis une huitaine de jours ont décidé de « ne plus laisser faire », s’installant chaque après-midi autour d’une table de camping avec jus de fruits, café et petits gâteaux.
« Rien ne leur fait peur » Pas de quoi tenir un siège mais suffisamment de volonté pour montrer qu’eux aussi savent occuper le terrain, autrement qu’en se livrant à de petits trafics de produits stupéfiants.
Après une pétition en juillet, une réunion avec le bailleur Habitat de la Vienne (lire ci-dessous), la police, la Ville, puis des courriers, rien n’a vraiment bougé. La police nationale a certes multiplié les passages sans toutefois réussir à faire cesser ces trafics. « Le soir, témoigne Xavier, les insultes et les noms d’oiseaux pleuvent. Ils nous menacent et nous disent qu’ils n’arrêteront pas. Alors nous, on est là, de 15 h à 19 h. Tout le monde dans l’immeuble dit des choses mais on aimerait avoir plus de soutien ! »
« Ces jeunes, ils ont 18-20 ans, rien ne leur fait peur, ajoute Catherine. Si on essaie de parler avec eux, on se fait agresser. On les connaît. Quand ils étaient plus jeunes, ils étaient plus gentils. Aujourd’hui, ils dealent devant nous. La semaine dernière, c’était carrément dans le hall avec échange de billets et de drogue. La police est venue, depuis ils sont dehors. Au moins,
ça fait peur aux clients. Nous locataires, on a dit qu’on continuerait jusqu’au bout ! »
En fin de journée, une fois les locataires rentrés dans leurs appartements, le terrain est de nouveau occupé. Pour eux demain, tout sera à refaire…
Repères : aux Trois-Cités
Des initiatives plus ou moins analogues ont eu lieu dans le quartier des Trois-Cités au cours des deux derniers étés. Avec l’appui du centre socioculturel, le mercredi soir, des mamans bénévoles du quartier souhaitant lutter contre la délinquance ont organisé un Pedibus, sorte de
ronde nocturne pour faire rentrer les enfants chez eux afin d’éviter qu’ils restent au pied des immeubles. L’initiative est pour l’heure en suspens.